Les sœurs Philippe et leur famille

Jeanne, Madeleine, Yvonne et Suzanne Philippe sont les quatre filles du maire de Saint-Denis pendant la Première Guerre mondiale. Gaston Philippe, leur père, est un homme engagé. Il a quitté la Normandie avec toute sa famille pour faire vivre son idéal politique socialiste en banlieue parisienne. Il veut changer le monde.

La guerre de 14 éclate alors que les quatre jeunes filles n’ont pas encore fêté leurs vingt ans. Leurs deux frères, René et Gabriel, sont mobilisés. Elles se relaient pour qu’ils reçoivent chacun une lettre par jour.

Durant l’été 1915, Gabriel est blessé à la jambe. Il meurt brutalement de la gangrène, provoquée par une boîte de cachous rouillée qu’il gardait dans sa poche. C’est un véritable choc. Les sœurs vont intérioriser le souvenir de leur frère adoré et porter le deuil pendant deux longues années. Madeleine conserve précieusement une mèche des cheveux de Gabriel dans le médaillon qu’elle garde à son cou.

Elles vont développer, toutes les quatre, une haine farouche et militante de la guerre.

Les sœurs Philippe sont des femmes modernes et indépendantes. Elles ont toutes obtenu leur certificat d’études. Elles refusent d’être soumises. Elles se veulent libres… quitte à divorcer. A l’image d’Yvonne, en 1923, quinze jours seulement après son mariage : son mari ne voulait pas accepter qu’elle travaille. Elle le quitte et la famille entière lui donne raison.

Chacune se marie mais elles font « la grève des ventres ». Elles renoncent à la maternité pour signifier leur refus de la guerre. Seule Madeleine met au monde un petit garçon le 31 mai 1922. Son prénom s’impose immédiatement : Gabriel, comme le frère foudroyé en pleine jeunesse.

Il devient l’enfant unique des quatre sœurs. Elles font tout pour le protéger. Pendant la Seconde Guerre mondiale, elles vont jusqu’à lui faire fabriquer de faux papiers pour empêcher son départ en Allemagne. Très proche de sa mère et de ses tantes, c’est lui qui, à son tour, prend soin d’elles à la fin de leur vie.

 

Un article est consacré à Jeanne, Madeleine, Yvonne et Suzanne Philippe dans le Place aux archives ! n° 8.