Marcel Lamisse aimait faire du vélo. Il était père de deux fillettes, Marcelle, la grande, et Louise, la petite, née pendant la guerre, en 1915.
Marcel avait appris le métier d’ébéniste et travaillait peut-être, comme son frère, aux usines Pleyel à fabriquer des pianos. Une chose est sûre, Marcel s’intéressait à la vie politique. Il était militant socialiste, proche du maire et de Marcel Cachin.
Il est mort dans un combat inutile quelques jours avant la fin de la guerre, à l’aube, le 1er novembre 1918. Onze jours plus tard, à six heures du matin, son régiment était officiellement averti par un message téléphoné que l’armistice était signé. Son frère Yvon, lui, est mort le 3 octobre 1915 dans les terribles combats de Tahure.
Marcel est enterré au cimetière de Saint-Denis. Après sa mort, Eugénie, sa femme, et ses deux petites filles sont venues vivre dans le même immeuble que ses parents, au 189 boulevard Ornano, dans le quartier Pleyel.
Voilà la dernière lettre que Marcel a écrite au maire, quelques mois avant de mourir :
Jeudi 6 juin 1918
Monsieur Philippe
Espérant que cette missive vous trouvera en parfait état de santé, ainsi que Madame Philippe, vos demoiselles ainsi que René.
Car voici longtemps qu’il m’a répondu. Il est vrai, vu les grandes circonstances actuelles l’on ne peut pas faire ce que bon nous semble.
Je pense que vous devez avoir reçu la visite de mon frère pour les avis de décès que l’on me demande d’Yvon et d’Auguste. Car je suis averti que si mes certificats n’étaient pas fournis dans 4 jours je remonterais pour les tranchées, chose qui me laisse bien froid, car au bout de 4 ans un homme devient indifférent dans de pareilles circonstances. Malgré que je serais plus heureux de ne pas monter car je pense avoir fait ma part, mais tout cela s’arrangera.
Espérant vous voir ainsi que Cachin pour discuter bien des choses, bien des choses à toute votre petite famille, sans oublier Madame Philippe, à vous une sincère et cordiale poignée.
Bon souvenir, bien des choses à tous les camarades, dans l’attente d’être parmi vous bientôt.
Marcel Lamisse
Un article est consacré à Marcel Lamisse dans le Place aux archives ! n°7.
1 commentaire
curieuxdetout dit :
26 Mar 2015
Marcel Lamisse connaissait personnellement Marcel Cachin. Il en parle à plusieurs reprises dans les courriers qu’il adresse au maire.
Qui est Marcel Cachin?
Marcel Cachin est un Breton proche des Bretons socialistes de Saint-Denis.
Voilà sa biographie (de sa naissance jusqu’à l’entrée en guerre), telle que la présente le Blog « Le Chiffon rouge » de Paimpol :
« L’une des figures les plus marquantes du socialisme, puis du communisme français au 20e siècle, est bretonne et bretonnante. Marcel Cachin naît le 20 septembre 1869 dans le petit bourg de Plourivo, à côté de Paimpol. Son père est gendarme, sa mère fileuse de lin. Excellent élève, il fait ses études au lycée de Saint Brieuc, puis de Rennes, et enfin à l’Université de Lettres de Bordeaux où il sera professeur de philosophie pendant 15 ans. Il s’engage au Parti Ouvrier Français de Jules Guesde et de Paul Lafargue et en 1900, il devient conseiller municipal de Bordeaux. A Amsterdam en 1904, il se prononce pour l’unification des socialistes puis devient délégué à la propagande de la SFIO, écumant les meetings partout en France pour le compte du parti pendant 7 ans. Dès les années 1900, il s’engage contre le colonialisme, et entreprend entre 1908 et 1911 des voyages en Algérie dont il fait des nombreux compte-rendus. En 1912, il remplace Paul Lafargue comme rédacteur de l’Humanité. En 1914, il est élu député du 18e arrondissement de Paris. Au déclenchement de la guerre, il est partisan de l’Union Sacrée et du Gouvernement de Défense Nationale. »
Marcel Cachin a toujours souhaité le développement et une meilleure reconnaissance de la culture et de la langue bretonne. Il considérait le breton comme « la langue des paysans et des socialistes bretons ».
Plus tard, de mai 37 à juin 39, Marcel Cachin dirigera la revue « War Zao » (« Debout »), dont le sous-titre est « contre le fascisme oppresseur des individus et des Peuples, dressons le Front Populaire breton ». Dans les colonnes de « War Zao », on lit des articles en faveur de la méthode de breton de l’instituteur Yann Sohier, le père de la grande historienne Mona Ozouf, fondateur d’Ar Falz-Skol Vreizh. La méthode s’intitule Me a lennov (« Je lirai »).
Marcel Cachin a toujours été très proche des Bretons militants de Saint-Denis, et cela bien avant la guerre de 14. Et à Saint-Denis, des Bretons, il y en avait des milliers !
Marcel Lamisse, lui, était normand, comme Gaston Philippe, le maire de Saint-Denis.